La collection Chevassu (II)

La Bibliothèque de l’Académie nationale de médecine publie aujourd’hui dans le catalogue collectif Calames le volume III de la série médecine, de la collection de Maurice Chevassu, après les volumes I et V. Il comprend des documents portant sur 83 personnalités classées par date de naissance, de Philippe Petit-Radel (1749-1815) à Adolphe Gubler (1821-1885). Œuvre de collectionneur, le recueil de Maurice Chevassu contient quelques pièces anecdotiques évoquant la mémoire de médecins illustres, tel ce billet d’entrée pour 4 personnes à la ménagerie du Muséum d’histoire naturelle signé par Claude Bernard.

Mais la collection de Maurice Chevassu a d’autres mérites. Tout d’abord, elle constitue un recueil important pour l’iconographie de la profession médicale. Ce volume III, qui couvre la période d’apparition et de diffusion de la photographie, contient ainsi quelques photographies de personnalités médicales, qui ouvrent une nouvelle page de l’histoire du portrait de médecin, si étroitement lié à sa position sociale. On y trouvera par exemple une photographie tardive (vers 1860) de Bretonneau par Pierre-Ambroise Richebourg.

La collection fait apparaître des réseaux de sociabilité, le plus souvent au sein du milieu médical, même si certaines personnalités littéraires, artistiques ou politiques peuvent aussi figurer comme destinataire ou sujet des lettres (la princesse Ghika, Dantan, le comte de Chambord…). De nombreuses lettres concernent différents aspects de la vie académique et scientifique. Le dossier d’Édouard Brown-Séquard est à cet égard très riche : avec 11 lettres conservées, sont évoquées son active campagne pour l’élection à l’Académie des sciences qu’il emporte face à Germain Sée (en dépit de la « répugnance » qu’il confesse « à la perspective des visites qu’il doit faire en vue de son élection »), ou encore la création avec Vulpian et Charcot des Archives de physiologie normale & pathologique. Dans une lettre qu’il lui adresse le 29 avril 1878 qu’il lui adresse (Ms 902 (1773) n° 75, lettre n° 1), Brown-Séquart fait part à Paul Bert de la « révélation » qu’a été pour lui une présentation faite par Paul Bert devant l’Académie des sciences (il s’agit en fait de P. Bert, « De l’action de l’oxygène sur les éléments anatomiques », Comptes rendus de l’Académie des sciences, 1878, 1er semestre, T. LXXXVI, n° 8, séance du 25 février 1878, p. 546-550).

Le même texte fait écho à l’engagement républicain de Édouard Brown-Séquard comme de Paul Bert et à la crise de 1877, avec la dissolution de la chambre par le président Mac Mahon, et l’élection en décembre d’une chambre à majorité républicaine (dont fait partie l’Union républicaine à laquelle appartient Paul Bert, alors réélu député).

Les lettres de Jules Béclard relèvent d’un autre registre, grâce à trois lettres datées des années 1882-1883 et adressées à Louis Hubert Farabeuf, alors chef des travaux anatomiques, qui donnent quelques exemples de problèmes quotidiens de gestion de la Faculté de médecine de Paris (Jules Béclard en est alors le doyen) : il lui demande de procéder à la désignation du professeur et de l’aide d’anatomie chargés d’assister les professeurs de la faculté, l’informe qu’il ne remet pas en cause l’indemnité de 500 francs proposés versée à  Adolphe Jalaguier pour travaux extraordinaires ; en tant que doyen de la Faculté de médecine de Paris, il fixe les horaires de travail des bureaux du secrétariat et du service des travaux pratiques d’anatomie et du service des archives ; il lui fait part du montant des indemnités accordées par le ministre aux docteurs en médecine qui ont assuré des cours complémentaires aux élèves de l’école pratique, Arnaud-Edmond Routier, Auguste Nélaton et Paul Segond, et lui demande de les en instruire.

L’inventaire détaillé de la collection Chevassu se poursuivra au cours des prochains mois.

François Léger

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