« L’auteur de ce mémoire M. Hallmann est directeur médical de l’établissement hydrothérapique de Marienberg près Boppard sur le Rhin, Prusse rhénane. M. Hallmann est né à Hanovre. Pour être admis en Prusse à la carrière académique dans la faculté de médecine, il faut être 1° médecin praticien 2° Prussien. Les Prussiens sont admis à la pratique de la médecine après avoir passé les examens prescrits. Outre les examens en Prusse, il faut en outre à un étranger une autorisation du roi. Après avoir passé avec la plus grande distinction en 1839 ses examens à Berlin, M. Hallmann sollicita l’autorisation de pratiquer la médecine. En attendant la réponse, il se rendit à Louvain chez son ami M. Schwann, physiologiste célèbre, pour se livrer sous les yeux de son ami à des recherches microscopiques. Il y reçut en janvier 1840 la nouvelle que sa demande était refusée. Alors il prit la résolution de s’occuper de la pratique en Belgique. Après avoir passé trois mois à Paris dans l’été de 1840, il subit à Bruxelles les examens pour l’exercice de la médecine et de la chirurgie, et s’établit à Bruxelles. C’est là qu’il a fait ses premières cures d’eau. Au printemps de 1843, par l’entremise du Baron d’Arnim ambassadeur de Prusse, il obtint l’admission en Prusse, retourna à Berlin, et a depuis poursuivi la carrière d’hydrothérapiste rationnel. En 1844 il publia un travail sur le meilleur traitement du typhus. Cette même année il reçut du ministre de l’instruction publique la mission d’étudier à Gräfenberg la méthode de Priessnitz. C’est au retour qu’il publia le rapport précédent. Dans l’été 1843 le Dr Schmitz fondateur de l’établissement hydrothérapique de Marienberg lui en proposa la direction médicale. M. Hallmann accepta, parce qu’avant tout à un médecin hydrothérapiste il faut un établissement. » (Acad. Méd. Mémoires 1849 n° 22. M. Hallmann D.M. Utilité de l’hydrothérapie dans le traitement des maladies aigues. Rapport sur la nécessité d’établir à Berlin un service hydrothérapique pour le traitement des affections aigues. Manuscrit. 19 feuillets)
Ainsi le médecin hanovrien Eduard Hallmann (1813–1855) présente-t-il son parcours, insistant sur son itinérance et sur les détours que sa condition d’étranger a imposés à sa carrière, avant de se voir confier la direction de l’établissement thermal de Marienberg.
A travers ce témoignage du milieu du XIXe siècle sont mis au jour un certain nombre de questionnements qui se trouvent au cœur de la notion de médecin étranger. Comment et dans quel cadre administratif ou légal le définit-on ? Quelle est la part de la formation à l’étranger ? Quelles sont les conditions de son exercice et de sa pratique ? Enfin, dans quelle mesure certains pays ou certaines villes jouent-ils le rôle de pôles d’attractivité pour ces médecins ? Autant de problématiques qui seront abordées lors du colloque Hippocrate sans frontières : soigner en terre étrangère au XIXe siècle (Europe, mondes atlantiques et coloniaux) qui se tiendra les 15 et 16 novembre 2018 respectivement à l’Académie nationale de médecine et à l’Université de Nanterre.
Programme :
Jeudi 15 novembre 2018. Académie nationale de médecine, salle des séances
9h Accueil des participants, café
9h30 Jérôme van Wijland. Mot de bienvenue
9h40 Claire Fredj. Introduction
10h Première session. Qu’est-ce qu’un médecin étranger ? (Présidence Isabelle Renaudet)
Jehanne-Emmanuelle Monnier. Itinéraires médicaux dans les colonies françaises de l’océan Indien au XIXe siècle
Constantin Barbulescu. Être un médecin juif en Roumanie dans la seconde moitié du XIXe siècle
Anne Hugon. Les médecins africains en contexte colonial : des médecins étrangers ? L’Afrique occidentale britannique (1880-1950)
11h30 Discussion
12h Déjeuner
14h Deuxième session. Se former à l’étranger et constituer un corps médical national (Présidence Judith Rainhorn)
Nancy Gonzalez-Salazar. L’Uruguay du XIXe siècle. Pays d’accueil et terrain d’expérimentation des médecins européens (1828-1875)
Isabelle Renaudet. Les fils d’Orfila ? Se former à Paris, le cas des étudiants en médecine espagnols
15h-15h15 Pause
Ken Daimaru. L’itinérance estudiantine et le pluralisme médical dans le Japon du XIXe siècle
Sorin Grigoruţă. An Eastern Adventure. Foreign physicians in the Romanian Principalities and their role in the development of the medical system (first half of the XIXth century)
16h15 Discussion
17h Fin des travaux
Vendredi 16 novembre 2018. Université Paris Nanterre, bât. Weber, salle de conférences
9h Troisième session. Entre exercice médical et production d’une expertise : être médecin à l’étranger (Présidence Claire Fredj)
Francesco Pongiluppi. Médecins et pharmaciens italiens à Constantinople au XIXe siècle : soigner les compatriotes, soigner l’empire
Benoît Pouget. Soigner les soldats en terre étrangère. L’hôpital maritime français du Pirée et ses médecins pendant la guerre de Crimée (1854-1856)
10h-10h15 Pause
Pierre Nobi. Les commissions médicales envoyées en Espagne observer la fièvre jaune (1801-1828)
Clément Fabre. Ausculter la Chine. Le cabinet des médecins comme observatoire sociologique et anthropologique de la Chine (1839-1914)
Alice Aigrain. Entre vision coloniale et regard médical : soigner et photographier dans les colonies au XIXe siècle
11h45 Discussion
12h15 Déjeuner
14h Quatrième session. La France, un pôle d’attraction (Présidence Delphine Diaz)
Nathalie Sage Pranchère. Être “à la fois un homme capable et un homme honorable et moral” : règlementer l’exercice des médecins étrangers en France au XIXe siècle
Fabio D’Angelo. Entre formation et pratique. La médecine napolitaine en exil (France, fin XVIIIe siècle-1820)
Eugenia Bournova. Des médecins grecs à Paris. Parcours géographiques et enjeux sociaux
15h30 Discussion
16h Philip Rieder. Conclusions
16h30 Fin des travaux
Informations pratiques :
Dates et lieux : Jeudi 15 novembre 2018, Académie nationale de médecine, salle des séances, 16 rue Bonaparte, 75006 Paris ; vendredi 16 novembre 2018, Université Paris Nanterre, bât. Weber, salle de conférences, 200 avenue de la République, 92000 Nanterre.
Comité d’organisation : Delphine Diaz (Université Reims-Champagne-Ardenne, CERHIC), Claire Fredj (Université Paris Nanterre, IDHE.S), Isabelle Renaudet (Aix-Marseille Université, TELEMMe), Philip Rieder (Université de Genève, iE2H), Isabelle Robin (Sorbonne Université, Centre Roland Mousnier), Nathalie Sage Pranchère (Sorbonne Université, Centre Roland Mousnier), Jérôme van Wijland (Bibliothèque de l’Académie nationale de médecine)
Entrée libre.
Jérôme van Wijland